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Notre monde post-épidémie sera-t-il vraiment différent, de l’Asie à l’Europe ?

vendredi 3 avril 2020, par Yves

Le monde ne va pas complètement changer mais ceux qui pensent qu’il redeviendra "comme avant" risquent de se tromper.
The world is not going to change completely but those who believe it will be "like before" risk to mistake.

|Une période comme celle que nous traversons avec l’épidémie de Coronavirus-Covid 19 exige réflexions et suggestions. L’avenir sera fait d’initiatives et de décisions parfois douloureuses. Mais à coup sûr, de nouvelles pistes vont s’ouvrir. Lesquelles ? Tout dépendra, en Asie comme en Europe, du nouvel environnement international. Ce texte essaie d’apporter des idées neuves.

Nous pouvons sortir de la crise provoquée par le virus en allant vers un monde différent ou revenir au monde tel qu’il existait avant.

1/ Comme avant ?
Si nous revenons au monde tel qu’il était avant la crise du virus, des tas de gens illustres l’expliqueront, à eux la parole…Et il y a de fortes chances que le capitalisme s’ajuste à la situation sans en changer les règles. Comme aujourd’hui, ceux et celles qui sont en bas de l’échelle continueront à faire les sales boulots, beaucoup d’entre eux venant de l’immigration : apporter et compter dans les supermarchés, fabriquer pour nos besoins, s’occuper de nous quand nous sommes malades, sortir les ordures de chez nous et les apporter là où leurs semblables les traiteront, conduire des avions, des trains, des taxis, etc. pour que nous puissions travailler et faire du tourisme, s’occuper de nos parents quand ils sont trop vieux. On les paiera un peu mieux si leurs syndicats savent faire valoir leurs besoins et l’ordre ancien n’en sera pas bouleversé. Voyez comment s’est soldée la crise américaine des “sub-primes” en 2008, elle a certes ajouté des règles de supervision sur le métier bancaire mais le capitalisme, même avec un Noir à la tête des États-Unis, a survécu à la crise.

2/ Un nouvel ordre
Plus autoritaire ou plus démocratique ? En revanche, si nous pensons qu’un nouvel ordre doit être rebâti, cela devient plus intéressant car le changement peut aller dans deux directions complètement opposées. Ce nouvel ordre pourrait devenir plus « démocratique ». Un des résultats pourrait en être une meilleure gouvernance. La Chine, qui est probablement à l’origine de l’expansion du virus dans le reste du monde et les États-Unis qui paient cher d’avoir trop longtemps nié sa gravité devront céder une partie de leurs droits aux autres pays. Nous pourrions alors avoir une modalité de gouvernement du monde plus proche de celle des Nations-Unies avec un Conseil de Sécurité réformé, fusionné avec le G20 et donnant ainsi la parole à d’autres continents, notamment l’Asie. Mais ce nouvel ordre pourrait aussi devenir plus “autoritaire”. Avant le virus, c’était la tendance générale, de la Sinamérique à la Turquie d’Erdogan et même au tandem Poutine-Assad. Mais les gouvernements autoritaires ont-ils mieux réussi que les autres ? Cela reste à voir. En même temps, certains pays comme la France ont mis en œuvre des politiques jacobines, avec un plus grand succès, au moins initial, que d’autres moins directifs, sans doute trop libéraux comme les États-Unis. A l’autre bout de l’échelle, la Chine, la Corée du Sud et même Israël ont été décrites par certains avocats ou écrivains soucieux de droits humains autant que d’efficacité sanitaire comme le « meilleur des mondes » que brocardait Aldous Huxley…

3/ Éclatement ?
Washington donne le sentiment de courir derrière ses États fédérés, mais est-ce provisoire, avec à sa tête un Trump affaibli, ou durable, qu’il soit ou non réélu ? La Chine connaît peut-être la même sorte de dilemme. Plus encore que de conserver toutes ses prérogatives au parti communiste, Xi Jiping est soucieux de préserver l’unité de la Chine, un défi pour les Empereurs qui l’ont précédé pendant 5 millénaires. Les deux leaders qui ont été limogés à Wuhan l’ont dû à leur incapacité à juguler l’épidémie autant qu’à leurs tentatives d’en masquer la gravité à Pékin. Les historiens et les électeurs diront si l’autorité fonctionne mieux que le gouvernement à distance. Mais en tout cas, celui-ci doit exhiber quelque expertise, sur le modèle traditionnel du « despote éclairé » européen du 18ème siècle.

4/ Expertise
Aujourd’hui, une stratégie crédible à l’égard du virus doit reposer sur l’expertise. Cela signifie savoir scientifique, sans qu’on sache clairement lequel est correct et lequel ne l’est pas. En France, un médecin a été et est encore (elle puis il ont changé pendant l’épidémie) ministre chargé de la santé et ils ont été tous les deux populaires. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, Monsieur-je-sais-tout sont l’un et l’autre des hommes politiques, avec des effets désastreux pour leurs compatriotes. Si l’on regarde vers l’Orient – le Japon et la Chine dans une certaine mesure -, les citoyens donnent le sentiment de savoir ce qu’il faut faire mieux que leurs gouvernants qui préfèrent regarder ailleurs, comme M. Abe au Japon. Là où elles sont sincères, les élections diront qui avait raison.

5/ L’économie d’après verra-t-elle certains secteurs chuter pendant que d’autres seront en croissance ?
Il parait assuré que certains secteurs qui ont profité de la mondialisation seront victimes de la relocalisation de leurs activités, comme la production de masques, de tests, etc. et plus généralement des produits que la division mondiale du travail permettait, depuis un demi-siècle, de fabriquer à distance pour moins cher. Certaines activités particulièrement liées à la mondialisation devront décliner : les fruits et légumes venus du bout du monde, mais aussi le tourisme. Cela permettra aussi de lutter contre le changement climatique. Tant de gens se sont mis à écrire sur l’avenir assombri du tourisme et donc du transport aérien ! Ayant passé du temps personnellement à Venise noyée sous l’ “acqua alta” puis dans des régions japonaises percevant comme une catastrophe similaire l’absence de touristes chinois, vivant aujourd’hui dans une région qui se plaint de la fin du tourisme au long cours, je pense que la mobilité, les avions etc. resteront une activité importante pour beaucoup de gens mais devront coûter plus cher pour survivre. Et le tourisme doit aussi être plus juste. Ceux qui dépensent des dizaines de milliers de dollars pour escalader les pentes de l’Everest, ceux qui “visitent” l’Asie du sud-Est parce c’est moins cher que chez eux mais se tournent vers leurs consulats dès qu’ils ont un problème de santé ont-ils droit à une coûteuse protection de la part de leur gouvernement pour rentrer chez eux ? Si ce service leur coûtait plus cher, ils y regarderaient à deux fois avant de partir…On voit aujourd’hui se développer des solutions aux sorties devenues impossibles : le « e »-tout, qui permet de voyager à travers le monde , et aussi de rencontrer ses collègues de travail à travers ordinateurs et smartphones.Et pour les interactions sociales physiques qui rendent indispensable le contact direct, restons locaux !

6/ Un rééquilibrage des capacités de production
En somme, nous aurons besoin de consacrer une plus grande partie de notre PIB et une plus vaste proportion de nos territoires à des activités de production qu’il serait moins coûteux de concentrer dans de grandes villes. Cela veut dire que le capitalisme survivra ( qui pourrait donner la preuve du contraire ?) à condition qu’il se montre plus compatible avec le respect de la nature et des besoins locaux. Si le capitalisme ne réussit pas cette mutation, il nous restera non pas le communisme que Gorbachev et quelques autres ont tué, mais le nazisme.

Qui veut que ça finisse comme ça ?

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After CODIV19, a different world ?

This is a try to provide new ideas. We may go out of this virus crisis just by going back to the way it was before, or not.

1/ Business as usual ?
If we go back to before the virus crisis, zillions of persons can explain... And there is a very high probability that capitalism is marginally adjusted to a situation which doesn’t change the rules. The current rules mean people who are already at the low end of the scale will keep on doing the same kinds of petty jobs, very often coming from a migrate background : bringing and counting goods at the supermarkets, making food for us and taking care of us when we are sick, taking the rubbish from our homes to local disposal places, driving airplanes, trains, taxis, etc. to manage our jobs and touristy (limited) curiosity, taking care of our parents when they get old.We will pay them a little better if their trade-unions are skilled enough to get it, and the old order will survive. Look at what happened after the US crisis of “sub-primes” in 2007-2008, it only created more pressure on banks but capitalism, even with a black face at the head of the US, didn’t change.

2/ A new order
More authoritarian or more democratic ? If we consider a new order has to be rebuilt, it becomes more interesting because it can go into completely opposed directions. It could be more “democratic”. One of the outcomes could be a better governance. China, who was probably responsible for the extension of the virus in the US and will pay a deadly prize for staying too long in denial, will have to give up some of their powers to other countries. We may face a more UN-type way of governing the world with a reformed security council which would merge with the G20 and thus give a better say to every continent, including Asia.It could also, or altogether, be more “authoritarian”. Before the virus, we could see almost everywhere, from Chinamerica to Turkey’s Erdogan and even the tandem Putin-Assad that trend. But did authoritarian powers do better than the others ? It remains to be seen. Similarly, some countries like France did for a time better with a very Jacobian policy than some others which were milder, even too mild like the US. More extreme, China, Korea and even Israel have been also described as “a brave new world” by lawyers or authors caring of a proper balance between emergency for sanitary reasons and human rights.

3/ Dilution of the Central power.
Washington seems to relinquish its powers to the States, but is it only for the time being because Trump is in disarray, or will it last after he is re-elected or defeated ? China might be in the same kind of dilemma. More than keeping the Communist Party at the helm, Xi Jinping is looking for a preservation of unity which has been the obsession of Emperors for 5 millenaries. To fire 2 communist executives in Wuhan was due to their incapacity to deal with the epidemic as much as their coverage to Beijing authorities. So, history and voters will decide if authority can work better than mildness or undecisiveness. But it should show some expertise, with the classical image of “enlightened despotism” in 18th century’s Europe.

4/ Expertise.
Nowadays, a valid strategy against the virus must rely on expertise. It means scientific knowledge, and it is not clear who is good and who is not. In France, there was a doctor as minister for health at the start and in the middle (the persons changed in between) of the epidemic and she/he were rather popular. In the US and UK, the President/PM-who-know-everything-about-everything are high level politicians who changed positions, with loss of time for every citizen. If you look at the extreme East examples – Japan and PRC to a certain extent - it looks like citizens’ judgment has been more clever than the governments who looked the other way, like Mr Abe in Japan. The next elections will tell who was right.

5/ In the economy after the virus, some sectors will fall, some will rise.
It seems obvious that some sectors which benefited of globalization will have to pay the prize of renationalizing their activities : production of masks, tests, etc. and more generally, producing again in a number of countries what could for half a century be cheaper when relying on a global division of labour.Some activities which are linked to globalization will have to decline and it’s very linked to the fight against climate change, especially when it comes to vegetables, fruits and also tourism ? So many people have started writing about tourism’s and therefore air transportation’s dark future, having personally lived the “acqua alta” in Venice, the virus crisis which cost dear to Japanese regions and now living in a French part which counts on tourism, I think mobility, aircrafts etc. are a very important industry to many workers but it has to cost more money to survive. And it should be more fair : people who spend thousands of dollars to climb up the Everest, people who travel to SE Asia because it is less expansive than home but turn to home’s Consulates when there is a problem with a pandemic, are they entitled to get a free air ticket from their government to fly back home ? If it was more expansive, they would think it twice before leaving their homes…Maybe one cheaper solution is already widely practiced because of the current situation : “e” everything which allows us to travel all over the world and also to meet colleagues with our computers and smartphones. And as for social interactions, let’s keep them local !

6/ Rebalancing of productive capacities.
All in all, we need a bigger share of each country’s GDP and more spread all over the country instead of being concentrated on cities where production, on account of its concentration, could be cheaper.It means capitalism will survive (who else would prove the opposite ?) IF it can be more nature and locally friendly. If not, it would mean NOT communism that Gorbachev and a few others have killed but Nazi chaos.

Who wants that ?