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Mme Takaichi Sanae Première ministre du Japon.
mercredi 22 octobre 2025, par
Mme Takaichi Sanae, première ministre du Japon/Mz Takaichi Sanae Prime minister of Japan
Mme Takaichi Sanae Première ministre du Japon.
L’auteur de ces lignes a déjà écrit tout récemment sur le même sujet, pourquoi ce comique de répétition ?
Eh bien parce que jusqu’au dernier moment, Mme Takaichi Sanae, la candidate du Parti Libéral Démocrate (PLD) dont elle était Présidente depuis le 4 octobre, a dû négocier pour trouver une majorité, le PLD l’ayant perdue aux élections sénatoriales du 20 juillet dernier.
Parmi ses premières actions avant d’être consacrée Première ministre, elle a récompensé ceux qui l’avaient aidée à gagner l’élection à la tête du PLD, en particulier M. Aso Tarô, 85 ans, un des barons qui y font la loi et qu’elle a nommé vice-Président du parti escorté de son beau-frère, secrétaire général, ainsi qu’un autre proche comme Président du Conseil général du PLD. Elle a également nommé M. Kobayashi Takayuki, un de ses concurrents vaincu mais rallié comme Président du Conseil de recherche politique, et M.Hagiuda comme secrétaire général adjoint du PLD, ce qui n’a pas manqué de soulever des critiques même au sein du parti car il avait perçu de sa faction un financement opaque, une des raisons de l’échec électoral du précédent Premier ministre M. Ishiba Shigeru. M. Hagiuda symbolise par ses prises de position très droitières le « vieux PLD »…
Mais il ya plus grave : les pourparlers entre le PLD et le parti d’inspiration bouddhiste Komei ont échoué et ces deux partis dont la coalition avait duré 26 ans et assuré au PLD le gouvernement presque continu du Japon se sont séparés, le Komei trouvant que le PLD n’agissait pas suffisemment contre l’argent opaque. Cette décison a plongé le parti au pouvoir dans une grande inquiétude, Mme Takaichi en prenant la responsabilité et s’engageant à trouver un partenaire stable.
Les marchés, qui n’aiment pas l’incertitude, ont sur le coup perdu 2,58 % qu’ils ont largement regagné depuis. Mme Takaichi s’est tournée vers d’autres partenaires, le Parti constitutionnel du Japon (social-démocrate et attaché à la Constitution pacifiste) et Ishin, le Parti japonais de l’innovation . Comme leur proximité dans le conservatisme le laissait prévoir, Mme Takaichi a conclu un pacte de gouvernement en 12 points avec son leader, M. Yoshimura, par ailleurs gouverneur d’Osaka, qui lui a assuré l’élection comme première ministre le 21 octobre. C’est pour l’instant un soutien sans participation.
Mme Takaichi, élue Première ministre dès le 1er tour avec 4 voix de majorité a présenté à l’Empereur ce 21 octobre le nouveau cabinet et disposera d’un an et demie jusqu’à l’expiration du mandat de la Diète et une nouvelle élection. Elle a eu l’habileté de nommer à des postes prestigieux de ministres ses rivaux au sein du PLD. En revanche, deux femmes sur 20 ministres, c’est encore le Japon traditionnel qui domine. Sur les images où Mme Takaichi du fond de la Diète salue pour remercier ses collègues parlementaires, elle est entourée de vieux hommes… Or au Japon, on ne peut être ministre si on n’est pas déjà parlementaire, le vivier était donc limité !
Son partenaire Ishin pourra-t-il remplacer le Komei ? Il sera certainement plus allant que celui-ci dans la recherche de l’abrogation de l’article 9 de la Constitution pacifiste, mais la majorité de l’opinion japonaise est hostile à tout ce qui pourrait entrainer à nouveau l’archipel dans la guerre, sans parler d’une force nucléaire. Komei était conciliant avec la Chine, ce n’est pas du tout l’orientation d’Ishin, mais on ne voit pas le gouvernement Takaichi, dans le peu de temps qu’il va durer, se lancer dans un processus belliciste.
En revanche, sa politique pourrait inclure une baisse de 10% du nombre de parlementaires, une baisse de la TVA, notamment sa suppression pour les produits alimentaires de base, et la baisse de la fiscalité sur l’essence.
Au même moment, M. Shigeru Ishiba publiait une déclaration « personnelle » marquant le 80ème anniversaire de la fin de la 2ème guerre mondiale dans laquelle il met l’accent sur l’importance de la démocratie et de l’économie libérale ainsi que sur le processus historique qui a conduit le Japon à une guerre désastreuse. Il souligne « l’insuffisance à l’époque du contrôle politique sur l’armée et le nécessaire courage pour regarder le passé, ainsi que, dans le présent, une attitude d’écoute des arguments des autres. » Pour le reste, il se réfère sans autre détail aux « déclarations des gouvernements précédents » sur la guerre.
Or voilà qu’il y a quelques jours est mort à 101 ans M. Murayama Tomiichi, Premier ministre socialiste de 1994 à 1996, dont la coalition était trop diverse (« on ne mélange pas l’eau et l’huile » disait-il) pour durer mais qui prononça alors la déclaration la plus déterminée à demander pardon pour les souffrances infligées par le Japon à ses voisins, en particulier la Chine, ce qui depuis devint la position officielle du gouvernement japonais.
Mais le Japon, c’est avant tout une grande puissance économique et un des pays les plus industrialisés, membre du G7. Après la surprise initiale de l’élection à la présidence du PLD d’une partisane d’une politique économique proactive et d’un assouplissement monétaire, à la présidence du PLD, les marchés se sont ressaisis et l’indice Nikkei a atteint un nouveau record. Il atteint ce 21 octobre environ 49400 yen et certains experts le voient à terme à 70 000 yen.
Quel sera à cet égard le programme de la nouvelle Première ministre ?
La relance de l’énergie nucléaire voulue par l’entreprise TEPCO, alliée de longue date au parti dominant en charge de la centrale nucléaire de Fukushima dont l’accident en mars 2011 fait encore des victimes par irradiation apparaît comme un autre exemple de l’indifférence du PLD au sort de la population. Or Mme Takaichi a souligné lors de sa conférence de presse le 19 septembre qu’elle considérait l’énergie et la politique industrielle comme un tout. Plus précisément, l’énergie nucléaire serait redémarrée tout en assurant la sûreté avant de passer à la prochaine génération de « réacteurs à eau légère innovants ». Le plan serait d’exploiter un réacteur à fusion nucléaire dans les années 2030 et de « viser un taux d’autosuffisance énergétique domestique de 100 % ». Toujours au chapitre de l’énergie, une baisse des taxes permettrait de diminuer le coût de l’essence pour les particuliers.
Conclusions : 1/ le triangle entre PLD, entreprises et hauts fonctionnaires retraités des finances ou de la construction (« amakudari » ou « descente du ciel ») qui a de longue date si bien fonctionné est fragilisé, résistera-t-il au cours des prochaines années ?
2/ On constate certes un peu partout que la « Generation Z" a pris le pouvoir, mais on en est fort loin au Japon même si un certain besoin de renouvellement s’est fait sentir – c’est déjà le cas avec le choix d’une femme comme première ministre, ce qui n’était jamais arrivé.
Mais au-delà, le changement est loin de se borner à une génération et les vieilles appartenances politiques - PLD, factions, partis hérités de la guerre froide - laissent peu de place à d’autres aspirations…
3/ Rêvons un peu : une alliance entre candidat plus jeune du Parti constitutionnel et la partie moderniste du PLD permettrait-elle un gouvernement à la fois social et stable ?
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Ms Takaichi Sanae, Prime Minister of Japan.
The author of these lines has already written recently on the same subject, so why this repetition ?
Well, because until the very last moment, Ms Takaichi Sanae, the candidate of the Liberal Democratic Party (LDP), of which she had been president since 4 October, had to negotiate to secure a majority, as the LDP had lost it in the senatorial elections on 20 July.
Among her first actions before being confirmed as Prime Minister, she rewarded those who had helped her win the election as head of the LDP, in particular Mr Aso Tarô, 85, one of the party’s power brokers, whom she appointed as deputy president of the party, accompanied by her brother-in-law, the secretary-general, and another close associate as president of the LDP’s General Council. She also appointed Mr Kobayashi Takayuki, one of her defeated rivals who had rallied to her cause, as Chairman of the Policy Research Council, and Mr Hagiuda as Deputy Secretary-General of the LDP, which drew criticism even within the party because he had received opaque funding from his faction, one of the reasons for the electoral defeat of the previous Prime Minister, Mr Ishiba Shigeru. Mr Hagiuda’s very right-wing positions symbolise the ‘old LDP’...
But there is more serious news : talks between the LDP and the Buddhist-inspired Komei Party have failed, and these two parties, whose coalition had lasted 26 years and ensured the LDP’s almost continuous rule of Japan, have split, with the Komei Party feeling that the LDP was not doing enough to combat opaque money. This decision plunged the ruling party into great uncertainty, with Ms Takaichi taking responsibility and committing to finding a stable partner.
The markets, which dislike uncertainty, immediately lost 2.58%, but have since largely recovered. Ms Takaichi turned to other partners, the Japan Constitution Party (social democratic and committed to the pacifist constitution) and Ishin, the Japan Innovation Party. As their similar conservative views suggested, Ms Takaichi concluded a 12-point government pact with its leader, Mr Yoshimura, who is also the governor of Osaka, which secured her election as prime minister on 21 October. For the time being, this support does not involve participation.
Ms Takaichi, elected Prime Minister in the first round with a majority of four votes, presented the new cabinet to the Emperor on 21 October and will have a year and a half until the Diet’s term expires and new elections are held. She skilfully appointed her rivals within the LDP to prestigious ministerial posts. On the other hand, with only two women out of 20 ministers, traditional Japan still dominates. In the images showing Ms Takaichi at the back of the Diet waving to thank her parliamentary colleagues, she is surrounded by old men... However, in Japan, you cannot be a minister unless you are already a member of parliament, so the pool of candidates was limited !
Will her partner Ishin be able to replace Komei ? He will certainly be more enthusiastic than Komei in seeking the repeal of Article 9 of the pacifist Constitution, but the majority of Japanese public opinion is hostile to anything that could lead the archipelago back into war, not to mention a nuclear force. Komei was conciliatory towards China, which is not at all Ishin’s position, but it is unlikely that the Takaichi government, in the short time it will last, will embark on a warmongering process.
On the other hand, its policy could include a 10% reduction in the number of parliamentarians, a reduction in VAT, notably its abolition for basic foodstuffs, and a reduction in taxation on petrol.
At the same time, Mr Shigeru Ishiba published a ‘personal’ statement marking the 80th anniversary of the end of the Second World War, in which he emphasised the importance of democracy and the liberal economy, as well as the historical process that led Japan into a disastrous war. He emphasised "the inadequacy of political control over the military at the time and the necessary courage to look at the past, as well as, in the present, an attitude of listening to the arguments of others. ‘ For the rest, he refers without further detail to ’statements by previous governments" on the war.
A few days ago, Mr Murayama Tomiichi, the socialist Prime Minister from 1994 to 1996, died at the age of 101. His coalition was too diverse (" you can’t mix water and oil," he said) to last, but who made the most determined statement asking for forgiveness for the suffering inflicted by Japan on its neighbours, particularly China, which has since become the official position of the Japanese government.
But Japan is above all a major economic power and one of the most industrialised countries, a member of the G7. After the initial surprise of the election of a supporter of proactive economic policy and monetary easing as president of the LDP, the markets recovered and the Nikkei index reached a new record high. On 21 October, it stood at around 49,400 yen, and some experts predict it will eventually reach 70,000 yen.
What will the new Prime Minister’s programme be in this regard ?
The revival of nuclear energy sought by TEPCO, a long-time ally of the ruling party in charge of the Fukushima nuclear power plant, whose accident in March 2011 is still claiming victims through radiation, appears to be another example of the LDP’s indifference to the fate of the population. However, Ms Takaichi stressed at her press conference on 19 September that she considered energy and industrial policy as a whole. More specifically, nuclear energy would be restarted while ensuring safety before moving on to the next generation of ‘innovative light water reactors’. The plan is to operate a nuclear fusion reactor in the 2030s and ‘aim for 100% domestic energy self-sufficiency’. Still on the subject of energy, a reduction in taxes would lower the cost of petrol for private individuals.
Conclusions : 1/ The long-standing triangle between the PLD, businesses and retired senior finance or construction officials (‘amakudari’ or ‘descent from heaven’) has been weakened. Will it survive in the coming years ?
2/ While it is true that Generation Z has taken power almost everywhere else, this is far from being the case in Japan, even though there is a certain need for renewal – as evidenced by the election of a woman as prime minister, which has never happened before.
But beyond that, change is far from being limited to one generation, and old political affiliations – the LDP, factions, parties inherited from the Cold War – leave little room for other aspirations...
3/ Let’s dream a little : would an alliance between a younger candidate from the Constitutional Party and the modernist wing of the LDP allow for a government that is both social and stable ?