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L’ASEAN existe-t-elle ? Does ASEAN exist ?

mardi 16 juin 2020, par Yves

L’ASEAN a été créée en 1967 mais minée par le principe de souveraineté et par son extrême diversité, elle est incapable de respecter ses normes.
ASEAN was created in 1967 but due to its principle of sovereignty and an extreme diversity, it can’t enforce her standards

L’ASEAN existe-t-elle ?

Comme le sait le lecteur, l’ASEAN a été créée en 1967 à l’initiative des Etats-Unis pour contenir les pays dits communistes, l’URSS et la Chine. On connaît la suite de l’histoire…

Dans les années 90, le communisme ayant triomphé dans l’ex-Indochine, l’ASEAN s’est trouvé une nouvelle raison d’être : exister face aux grandes puissances.

Dans un contexte de libéralisation économique et pour préserver l’indépendance d’Etats qui s’étaient émancipés de la tutelle coloniale de la France ou de la Grande-Bretagne – Vietnam, Laos, Birmanie et Cambodge, - l’ASEAN absorbe les anciens ennemis d’hier.

Mais a-t-elle su créer un espace intégré facilitant le commerce entre ses membres ? a-t-elle, au-delà du commerce, permis la promotion de valeurs communes entre ses 10 membres et prônées par sa Charte ? entre ses 10 gouvernements et les peuples qui la constituent ?

Au-delà même de l’Asie du Sud-Est, l’Asie dans son ensemble a-t-elle trouvé une unité dans les différents formats qui cherchent à en faire la preuve au reste du monde ?

La récente crise du COVID 19, les disparitions qui émaillent tristement la vie politique de ses membres jusqu’à ces derniers jours ont montré que rien n’allait de soi en la matière.

Quelques anecdotes vécues par l’auteur de ces lignes et remises en lumière par des événements récents montrent qu’il n’est pas plus facile à l’Asie qu’à l’Europe de faire preuve de cohérence.

Ainsi pouvait-on voir la Thailande et le Cambodge se faire la guerre, en plein sommet de l’ASEAN à Singapour, en 2008, autour du temple bouddhiste de Preah Vihar. A quoi l’ASEAN a-t-elle servi ? Les optimistes diront qu’au moins les belligérants étaient assis à la même table.

En 2020, nombreux sont les pays où l’on a prétendu – avec la complicité intellectuelle de savants Occidentaux – avoir vaincu le virus en expulsant des malades par milliers par-delà les frontières. Ainsi de travailleurs laotiens en Thailande, népalais en Inde et sans doute d’autres. L’essentiel est que ça ne se voie pas.

Faut-il s’étonner que les partisans de la manière forte tels que le régime vietnamien ou le Président philippin, sans oublier les militaires qui continuent de faire la loi en Birmanie, aient préféré faire bonne figure face aux touristes, aux investisseurs et aux compagnies aériennes dont ils ont fait dépendre leurs économies plutôt que de traiter leurs étrangers conformément aux droits humains ?

Certes, mus par la facilité, l’Union européenne et les chancelleries bilatérales à sa suite ont voulu voir en l’organisation un partenaire de l’Union, elle-même ébranlée ces dernières années par le Brexit et le COVID.

La réalité, c’est qu’il est bien difficile de faire travailler ensemble sur quelque sujet un peu délicat des pays aussi dissemblables que l’Indonésie et le Brunei, avec un secrétariat squelettique à Jakarta et surtout une règle d’unanimité paralysante.

Le petit mais solide Singapour n’a cessé de clamer que la solidarité entre pays d’Asie du Sud-Est était indispensable pour contrebalancer l’influence des grandes puissances de la région.

Ce n’était déjà pas facile dans les 20 premières années de ce millénaire mais la prospérité économique a permis à chaque pays de tirer son épingle du jeu. La pauvreté a reculé, la classe moyenne est devenue plus nombreuse, les riches encore plus riches.

On a vu ainsi la JICA japonaise déverser des sommes considérables, à la fois pour faire oublier la « sphère de co-prospérité » naufragée avec l’archipel en 1945, mais aussi pour faciliter le travail de ses entreprises, de plus en plus investies en Asie du Sud-Est à mesure que la défiance s’accentuait à l’égard de la Chine (« China plus one »).

Mais le Japon n’a pu empêcher la Chine de Xi Jin Ping d’avancer tranquillement son projet de « nouvelles routes de la soie » dans les pays qui ont avec elle une frontière en commun. C’est le cas de tous les pays d’Asie du Sud-Est. La « diplomatie du masque » en est l’illustration la plus récente. Les chiffres le disent : la Chine est maintenant le premier partenaire commercial (530 Mds $ en 2018) et le premier investisseur en Asie du Sud-Est.

Les Etats-Unis de M. Trump ne veulent plus jouer leur rôle traditionnel de protecteur armé de l’Asie équilibrant la volonté de puissance soviétique puis chinoise. Après une Présidence Obama qui proclamait sa volonté de « pivoter » vers le Pacifique, sans en avoir tous les moyens car il aurait fallu se dégager du bourbier moyen-oriental, le Président actuel souhaite se replier sur le Middle West où se trouvent la majorité de ses électeurs…

Alors, les pays asiatiques et en particulier ceux d’Asie du Sud-Est vont-ils trouver un modèle économique qui fasse de leur développement plutôt que d’une dépendance croissante de la Chine l’objectif de leur sortie de crise ?

Ils ont pour cela des points forts indéniables : une position géographique centrale, une agriculture encore capable de produire sans chimie, une forêt qui reste un poumon pour toute la planète et surtout une population jeune, de mieux en mieux éduquée, qui sait innover mais aussi s’adapter aux difficultés.

Leurs difficultés sont également identifiées : une pollution croissante, un développement industriel, touristique et aéronautique souvent débridé, des autorité publiques corrompues.

L’Union européenne saura-t-elle accompagner ce nouveau développement plutôt que de crier haro sur les deux Grands ?

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ASEAN, never too late to exist ?

The reader knows it, ASEAN was created by the US in 1967 to contain the progress of communism, USSR and China. We know what happened later…

In the 90’s, communism had stormed the former Indochina and ASEAN had to find a new target : to exist between the big powers.

In a time of a wave of liberalism and to allow countries which had gained independance against colonial powers such as France or UK - Vietnam, Laos, Burma and Cambodia – ASEAN absorbed former enemies.

But did it create a free-trade area ? did it promote common values promoted by its Charter between its 10 governments ? did it promote them between the governments and its peoples ?

Beyond South-East Asia, did Asia as a whole find unity between all the formats who pretend to show it to the world ?

The recent CODIV-19 crisis, the enforced disappearances which sadly happen in the political life of these countries show it is anything but certain.

Some stories the author lived and more recent events have displayed it is not easier in Asia than in Europe to show coherence.

Thus a war between Thailand and Cambodia about the Buddhist temple of Preah Vihar erupted into the summit of ASEAN in Singapore in 2008. Was ASEAN useful in preventing that war ? The optimists would say that at least the confronting countries were sitting at the same table.

In 2020, many Asian countries pretended – with the complicity of some Westerners – they had won against the virus while they were expelling Asian migrants. They did so from Thailand to Laos and from India to Nepal – and we can guess in other countries as well. The important is to stay unseen.

Are we surprised that regimes who favour strongmen, like the Vietnamese government or the Filipino President, and the army which still exerts power in Burma, are more attached to show a neat face to foreign tourists, investors and airlines their economies depend on than treating other Asians with consideration to the human rights ?

It is easier for the EU and the member-states which follow her to see ASEAN as a partner of the Union, which by the way has been shattered by the Brexit and COVID 19.

In reality, it is quite difficult to get practical decisions between countries as diverse as Indonesia and Brunei, with a limited secretariat in Jakarta and, last but not least, the rule of unanimity which paralyses the ASEAN.

The small but strong Singapore has been claiming that SEA countries should stay together to balance the big powers around.

It was already difficult during the 20 first years of that Millenary but economic success allowed all members to get something out of it. Poverty was reduced, the middle class grew and crazy riches were still richer.

The Japanese JICA threw a lot of money, together to compensate for the ill-fated “co-prosperity sphere” which collapsed with the archipelago in 1945, but also to help its corporations, investing more and more in SEA as distraught was increasing towards China (“China plus one”).

But Japan could not prevent Xi Jinping’s China to roll out its strategy of the “New silk road” in countries which shared with it a border, that is the case of all SEA countries. “Mask diplomacy” exemplifies it nowadays. Let’s look at the figures : China is now the number 1 trade partner (530 Bns $ in 20118) and the number one investor in SEA.

Mr Trump’s US don’t want anymore to be the protector of Asia and to balance the power of USSR then China. After the President Obama who wanted to “pivot” to the Pacific sea, without accomplishing it because he could not get himself out of the Middle East, the current President wants to isolate and take care of his electors in the Middle West…

Will Asian countries and among them SEA find an economic model allowing them to base their economic recovery on their resources instead of relying on China ?

They can count on their resources : a central geographical position, an agriculture which is still able to grow food without chemicals, a forest which still is a global breathe and mostly a young, well groomed and more and more innovative and also adaptable population ?

Its weak points are also well known : a growing pollution, an uncontrolled development of industry, tourism and aeronautics, corrupted public rulers.

Will the EU be able to propose that new model of development instead of howling on the two superpowers ?