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Vinexpo

dimanche 12 mai 2019, par Yves

Vinexpo 2019 : un verre à moitié plein ou à moitié vide ?

Vinexpo, le rendez-vous des professionnels du vin venus à Bordeaux de la planète entière commence demain.
Il se tient tous les deux ans, mais cette fois un peu plus tôt, avancé à mai au lieu de juin afin de mieux trouver sa place dans un calendrier très rempli, entre les Primeurs début avril et les vendanges en septembre.

Le grand public n’y est pas admis, si ce n’est à la « grande dégustation », une demi-journée de préouverture promotionnelle dimanche 12 mai après-midi, au splendide palais de la Bourse, édifié au XVIIIème siècle par Gabriel face à la Garonne et inscrit dans la façade classique qui fait la fierté de Bordeaux. La réunion professionnelle se déroulera à partir de demain au moins prestigieux mais plus fonctionnel Parc des expositions du 13 au 16 mai.

Vinexpo 2019 devrait être un millésime charnière en raison d’une conjoncture en demi-teinte. Verra-t-on le verre à moitié plein ou à moitié vide ? Les sujets de préoccupation ne manquent pas. Les trois plus graves sont le changement climatique, le Brexit et la conjoncture chinoise.

Le changement climatique n’est plus une menace lointaine.
En ce printemps 2019, on assiste à une croissance précoce de la vigne, due à un hiver doux – le réchauffement - suivie début mai d’un coup de froid meurtrier pour les jeunes pousses trop tôt exposées. Le bilan reste à établir mais déjà, on assiste à un déploiement spectaculaire de mesures destinées à contrer le froid sibérien qui a gelé bon nombre de pieds de vigne, du brasero à l’hélicoptère. Ce n’est certes pas la première fois, mais si ce phénomène déjà responsable de la moindre production de 2017 devenait récurrent, il risquerait de fragiliser l’offre girondine au risque d’ouvrir la voie à des concurrents.

Le climat des affaires est lui aussi fragilisé par d’autres évolutions plus immédiates.
Le Brexit est dans toutes les conversations, sans que la part de risque pour les exportations soit clairement définie. Même dans le scenario le plus « hard », on a peine à imaginer que les Anglais réduisent volontairement leur accès au claret dont ils font les beaux jours depuis Aliénor, il y a 8 siècles, hormis blocus continental et guerres mondiales. Certains redoutent le chaos aux frontières et dans les ports qui pourrait, techniquement, ralentir voire bloquer les flux commerciaux. On en saura plus dans quelques mois.

Plus redoutable est la dépendance envers le marché chinois car certains exportateurs, grisés par sa forte demande très rémunératrice ont un temps oublié la sage prudence et quelque peu négligé à son profit leurs autres clients.
Or la conjoncture politico-économique chinoise est à la merci de brusques retournements, comme on l’a vu en 2013-2014 dans le contexte de la lutte contre la corruption puis en 2018 davantage en lien avec un ralentissement de la croissance intérieure chinoise et les menaces américaines.

Celles-ci, ou du moins leurs effets restent imprévisibles. Sans aller jusqu’à redouter un éventuel affrontement militaire en mer de Chine, peu probable à court terme, les opérateurs sont inquiets des réactions en chaine sur la demande d’une conflictualité latente autant que de l’impact direct de sanctions commerciales.

Il y a cependant des motifs de satisfaction.

Après une année 2017 dont la production a été fortement réduite par le climat, la vendange 2018 est en net progrès en quantité et ne le cède en rien sur la qualité selon les premières analyses.

La Nouvelle-Aquitaine reste largement en tête des exportations de vin et Cognac avec les Etats-Unis pour principal marché (26% des exportations de Nouvelle-Aquitaine) devant la Chine (75% des expéditions françaises de vins et spiritueux) et Singapour. Après une hausse de 16% sur les 3 dernières années, les boissons restent largement en tête des exportations de Nouvelle-Aquitaine en 2018.

Un autre marché, historique, est porteur d’espoirs, celui du Japon. En effet, les droits de douane sur le vin y ont été ramenés à zéro par l’accord de partenariat conclu en 2019 avec l’UE. Le vin est devenu, dans ce pays à fort pouvoir d’achat, un produit de consommation courante, qu’on trouve à tous les prix jusque dans les « combini » (supérettes) et nos opérateurs y restent très actifs.

Enfin, ne négligeons pas les efforts accomplis par Bordeaux pour confirmer sa place de porte-drapeau du vin, consacrée par le succès de la cité du vin avec 450 000 visiteurs un an après son ouverture.
Vinexpo 2019 se situe donc au croisement de plusieurs défis, qu’a commencé à relever son nouveau Directeur général. Nommé en avril 2019, ancien de Kedge Bordeaux, il revient après 5 années à la tête d’un important salon professionnel à Singapour, il a pour objectif de redonner du tonus à une manifestation prestigieuse mais qui donne des signes d’essoufflement. L’édition 2017 avait accueilli 2.300 exposants et 40.000 visiteurs, un total en baisse de 11 % par rapport à 2015. A comparer à Prowein, à Düsseldorf en Allemagne, qui est aujourd’hui le n°1 incontesté des salons avec 6.870 exposants de 60 pays et 60.000 visiteurs professionnels en mars dernier.

Instaurée en 1981 par la CCI Bordeaux Gironde, Vinexpo est une marque désormais déclinée à Hong Kong, Shanghai, prochainement Paris (janvier 2020) et New York (mars 2020). Fort opportunément, les organisateurs ont placé au cœur de la manifestation un symposium international sur « changement climatique et vin », signe qu’à Bordeaux on ne néglige pas les défis d’avenir.

Quels sont les atouts de Vinexpo Bordeaux face à ses redoutables concurrents ?

Au premier chef son cadre historique et la proximité de vignobles parmi les plus convoités au monde – dont plusieurs centaines appartiennent à des étrangers, notamment asiatiques - que les professionnels peuvent ainsi visiter sans prolonger outre mesure leur séjour girondin ; sa desserte toute récente par le TGV et une infrastructure hôtelière en progrès. Reste le facteur humain, mieux adapté grâce aux efforts d’écoles de commerce ou de viticulture résolument engagées dans l’internationalisation, comme en témoignent la présence à Bordeaux de 3000 étudiants chinois et la présence sur le marché chinois de 67% des entreprises régionales du secteur.

Je remercie M. Denis Mollat et son équipe de libraires dévoués pour leur précieux soutien, tant sur le plan technique que pour leurs conseils et la bibliographie. Merci aussi à la Chambre de commerce et d’industrie de Nouvelle-Aquitaine et aux producteurs et négociants girondins qui ont bien voulu répondre à mes questions.

Bonne lecture et surtout : santé !

Le vin en Chine
(https://www.mollat.com/livres/1292782/gregory-chantereau-comment-reussir-ses-exportations-de-vin-en-chine).
Changement climatique et vin
https://www.mollat.com/recherche?requete=9782351561041
https://www.mollat.com/livres/2159616/laure-gasparotto-le-jour-ou-il-n-y-aura-plus-de-vin
https://www.mollat.com/livres/1584554/valery-laramee-de-tannenberg-menace-sur-le-vin-les-defis-du-changement-climatique

Quelques encyclopédies de la vigne et du vin :
https://www.mollat.com/livres/2240244/le-grand-larousse-du-vin-reconnaitre-choisir-garder-deguster-les-vins-du-monde-entier

En anglais
https://www.mollat.com/livres/2131773/karen-macneil-the-wine-bible
https://www.mollat.com/livres/2316925/kevin-zraly-windows-on-the-world-complete-wine-course

Encyclopédies axées sur la présentation des terroirs viticoles.
https://www.mollat.com/livres/2259932/collectif-journey-throught-wine
https://www.mollat.com/livres/2245318/jules-gaubert-turpin-la-carte-des-vins-s-il-vous-plait-l-atlas-des-vignobles-du-monde-56-pays-110-cartes-8-000-ans-d-histoire
https://www.mollat.com/livres/2246614/rajat-parr-the-sommelier-s-atlas-of-taste

Des livres pour connaître les vignobles bordelais :
https://www.mollat.com/livres/8033/ecole-du-vin-de-bordeaux-l-essentiel-des-vins-de-bordeaux
https://www.mollat.com/livres/2090933/brook-stephen-the-complete-bordeaux
https://www.mollat.com/livres/718/antoine-lebegue-les-vins-de-bordeaux
https://www.mollat.com/livres/1659354/oz-clarke-bordeaux-a-new-look-at-the-world-s-most-wine-region