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Encore la Chine/China again
lundi 6 mars 2023, par
Webinar : selon des experts, la Chine avance mais pas sans difficultés.
According to experts, China is progressing but meets many headwinds.
Oui, encore la Chine !
Mais comment ne pas suivre un débat sur une puissance mondiale avec la participation annoncée d’un grand ex-ministre ?
Il y avait aussi des chercheurs, un certain nombre de nationalités différentes, deux langues, le français et l’anglais, parlées et traduites l’une et l’autre, ce qui permettait aux auditeurs issus du monde entier de poser des questions.
Le débat était organisé par ce « think tank » car il avait obtenu un financement de la part de l’Union européenne (UE) pour cette étude, réalisée en partenariat avec l’institut Bruegel, lui-même institut de réflexion pro-européen. Il a porté sur l’évolution de la Chine, le cas africain et les déclinaisons des Nouvelles Routes de la Soie (BRI).
I. Le premier à s’exprimer a été l’ancien ministre.
Il a livré avec beaucoup de prudence ses impressions, nourries par de très nombreux contacts, concernant la Chine actuelle et son évolution au cours des prochaines années.
1/ Il ne voyait pas se produire de « scenarios extrêmes ».
Il fallait être bien conscient de la spécificité de l’emprise du Parti Communiste Chinois (PCC) et de Xi Jinping à sa tête. Un changement pouvait bien sûr se produire, mais il n’anticipait ni une attaque de Taïwan ni un isolement total du reste du monde.
Un retour à la ligne Deng Xiaoping, c’est-à-dire à la libéralisation de l’économie, personne n’y croyait. Toute la politique du « pivot » engagée par le président Obama visait à empêcher la Chine de devenir la première puissance mondiale. Les Etats-Unis avaient cru que l’entrée de la Chine à l’OMC la rendrait plus démocratique et avaient depuis compris leur erreur.
2/ Xi Jinping allait rester au pouvoir jusqu’en 2032.
Il pouvait se produire bien des aléas d’ici là tels que le mécontentement de la population dont de nombreuses manifestations témoignaient, le risque écologique auquel les Chinois étaient de plus en plus sensibles, le COVID ou d’autres virus pouvaient encore frapper.
Quant à la puissance militaire permettant d’attaquer Taiwan, elle ne serait pas disponible selon les experts avant 2025-2027 mais l’orateur n’était pas convaincu que cela se produise, car tout dépendrait de l’anticipation par le PCC des réactions de Washington, or si celle-ci ne faisait rien, il n’y aurait plus de garantie américaine nulle part…
En Afrique, la domination chinoise ne s’exerçait pas sans difficultés et depuis 1 ou 2 ans, les faiblesses chinoises étaient plus apparentes.
3/ Entre les Etats-Unis et la Chine, il ne pouvait y avoir de victoire totale. La RFA par exemple avait besoin du marché chinois.
Le vocabulaire du non-alignement était revenu, ceux qui s’abstenaient à l’ONU représentaient les 2/3 de l’humanité sans pour autant que l’unité règne entre eux, si ce n’est pour refuser de s’aligner derrière la Chine.
4/ Dans l’UE, l’Allemagne ne pouvait à la fois se priver du gaz russe et du marché chinois.
Les Etats-Unis ne pouvaient donc l’enrégimenter.
Répondant à des questions, l’ancien ministre rappelait que Deng Xiaoping avait voulu libéraliser l’économie chinoise mais n’avait jamais parlé de supplanter l’Occident. Le chaos qui avait présidé au déconfinement sanitaire en était un intéressant exemple.
Kishore Mahbubani qui était proche de Deng avait évoqué la fin de la parenthèse occidentale et avec lui beaucoup voulaient un avenir non-occidental mais il n’y avait pas d’unité entre eux.
La Chine venait de publier un plan de paix pour l’Ukraine, dont certains points pouvaient être acceptés par Zelenski. Elle prônait surtout la stabilité et c’est pourquoi elle prenait date pour une paix quel qu’en soit le médiateur. Si 3 ou 4 Etats européens importants refusaient le leadership américain, une alliance avec de grands hommes d’affaire américains était possible.
Ont suivi plusieurs table-rondes d’experts.
II. La première table-ronde traitait le cas africain.
Elle examinait les votes aux Nations Unies. Ceux en faveur de la Chine n’avaient pas progressé alors qu’elle en était devenue en 2000-2020 le premier créancier (150Mds USD), contrôlait 62% de la dette extérieure africaine, mais investissait peu avec 42 Mds. L’EXIM Bank en constituait le principal instrument. La Chine avait dépassé la Russie quand l’Union soviétique s’était effondrée.
L’endettement était corrélé avec l’affinité et les thèmes qui rapprochaient la Chine de l’Afrique étaient le Moyen-Orient, le désarmement et le nucléaire. Cependant, cela avait un caractère conjoncturel, distancié et on ne pouvait en conclure à un soutien politique durable.
III. Une deuxième table-ronde s’interrogeait sur l’image de la BRI.
Celle-ci avait produit 3 déclinaisons :
– La route de la soie digitale
– La route de la soie verte
– La route de la soie de la santé.
Elle rencontrait beaucoup de facteurs défavorables :
– Le conflit commercial avec les Etats-Unis.
– Des projets non rentables
– La COVID
– Des problèmes liés à l’investissement immobilier
Une première étude (« policy brief ») se demandait comment la BRI était ressentie hors de Chine – sans surprise, mieux dans ceux qui en bénéficiaient que chez les autres. La couverture médiatique était plutôt négative, comme en Asie, la BRI étant plus appréciée que la Chine elle-même.
Deuxième étude, au sein même de la Chine.
Du fait de son fonctionnement décentralisé, la BRI apparaissait comme une chance pour les bureaucrates locaux en leur permettant d’accéder à des prêts concessionnels.
Elle bénéficiait d’une présentation plus favorable dans les journaux en chinois qu’en langue anglaise.
De purement économique, la BRI évoluait vers un contenu politico-militaire qu’illustraient la « Global Security Initiative » et le thème du « développement de l’humanité ».
Commentaires
1 Les lecteurs le savent, ces analyses sont largement convergentes avec celles développées par l’auteur de ces lignes dans Gavroche il ya un mois. Mais il faut s’habituer à l’imprévisible et ce débat a montré par la prudence de ceux qui y ont participé qu’il était hasrdeux de faire des prévisions dans un monde en rapide changement.
2 Une étape importante sera constituée par le sommet du G20 en septembre prochain. Lors de sa réunion à Delhi au niveau des MAE, la Chine a rejoint la Russie pour refuser un communiqué commun qui aurait condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Qu’en sera-t-il quand se rencontreront les CEG (chef d’Etat et de gouvernement) ?
***
Yes, China again !
But how can you not follow a debate on a world power with the announced participation of a great ex-minister (the Chatham House confidentiality rules referred to by the moderator of the debate forbid to say who it was, who spoke and which Asia-focused think tank organised the debate).
There were also researchers, a number of different nationalities,
two languages, French and English, spoken and translated into each other, which
allowed listeners from all over the world to ask questions.
The debate was organised by the think tank because it had received funding from the Europe-an Union (EU) for the study, which was carried out in partnership with the Bruegel Institute, itself a pro-European think tank.
It focused on the evolution of China, the African case and the outcomes of the New Silk Road (BRI).
I. The first to speak was the former minister.
He was very cautious in giving his impressions, based on many contacts, about China today and how it will evolve over the next few years.
1/ He did not see any "extreme scenarios" occurring.
It was necessary to be well aware of the specificity of the hold of the Chinese Communist Party
(CCP) and Xi Jinping at its head. Change could of course occur, but he did not anticipate an attack on Taiwan or a total isolation from the from the rest of the world.
A return to the Deng Xiaoping line, i.e. liberalisation of the economy, no one be-lieved in it. President Obama’s "pivot" policy was aimed at preventing China from becoming the world’s leading power.
The US had believed that China’s entry into the WTO would make it more demo-cratic, and had since realised that its mistake.
2/ Xi Jinping would remain in power until 2032.
Many things could happen between now and then, such as the discontent of the population of which there were numerous demonstrations, the ecological risk to which the Chinese people were increasingly sensitive, COVID or other viruses could still strike.
As for the military power to attack Taiwan, it would not be available until 2025-2027, but the speaker was not convinced that this would happen as it would de-pend on the CCP’s anticipation of Washington’s reactions, and if Washington did nothing, there would be no American guarantee anywhere...
In Africa, Chinese domination was not without its difficulties and for the past 1 or 2 years, Chinese weaknesses were more apparent.
3/ Between the US and China, there could be no total victory.
Germany, for example, needed the Chinese market.
The vocabulary of non-alignment had returned, those who abstained at the UN
represented 2/3 of humanity, but there was no unity among them, except for
refusing to align themselves behind China.
4/ In the EU, Germany could not afford to be without Russian gas and the Chinese market at the same time.
The United States could therefore not count on it.
During the Q and R, the former minister recalled that Deng Xiaoping had wanted to liberalise the Chinese economy but had never talked about supplanting the West.
The chaos of sanitary decontamination was an interesting example.
Kishore Mahbubani ("The Asian 21st century" 2021), who was close to Deng, spoke of the end of the colonial parenthesis and with him many wanted a non-Western future but there was no unity among them.
China had just published a peace plan for Ukraine, some of whose points
could be accepted by Zelenski. Above all, it advocated stability. Therefore, it was committed to peace, whoever the mediator might be.
If 3 or 4 important European states refused the American leadership, an alliance with
American businessmen was possible.
This was followed by several expert round tables.
II. The first round table dealt with the African case.
It examined the votes at the United Nations.
China had not progressed even though it had become the largest creditor in 2000-2020 (USD 150 billion), controlled 62% of Africa’s external debt, but invested lit-tle :
42 billion. The EXIM Bank was the main instrument.
China had overtaken Russia when the Soviet Union had collapsed.
Debt was correlated with affinity and the themes that brought China and Africa together were the Middle East, disarmament and nuclear issues.
However, this was conjunctural, distanced and did not imply a lasting political support.
III. A second round table looked at the image of the BRI.
It produced 3 variations :
– The digital silk road
– The green silk road
– The health silk road.
It was facing many unfavourable factors :
– The trade conflict with the United States.
– Unprofitable projects
– COVID
– Problems with real estate investment
An initial policy brief asked how the BIS was perceived outside China - unsurpris-ingly, better in those who benefited from it benefited than in those who did not.
Media coverage was rather negative, as in Asia, with the BRI being more appreci-ated in China itself.
Second study, within China itself.
Because of its decentralised process, the BRI was seen as an opportunity for
local bureaucrats with access to concessional loans.
It was more favourably presented in Chinese language newspapers
than in English.
From being purely economic, the BRI evolved into a politico-military :
the Global Security Initiative and the theme of "human development".
Comments
1 As readers know, these analysis are largely convergent with those
developed by the author of these lines in Gavroche a month ago. But we have to get used to the unpredictable and this debate has shown by the prudence of those who took part that it is difficult to make predictions in a rapidly changing world.
2 An important milestone will be the G20 summit in September.
At its MFA-level meeting in Delhi, China joined Russia in rejecting a joint
declaration that would have condemned Russia’s invasion
of Ukraine. What will happen when the CGE (Heads of State and Government) meet ?
Voir en ligne : https://www.gavroche-thailande.com/